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Matériaux biosourcés et re2020 : construire bas carbone

Publié le 01/12/2025 | Temps de lecture : 8 min
Matériaux biosourcés et re2020 : construire bas carbone

Les matériaux biosourcés : une solution naturelle pour construire en conformité avec la re2020

L'essentiel à retenir

Les matériaux biosourcés (bois, chanvre, paille, ouate de cellulose) stockent le carbone et réduisent jusqu'à 60 % l'empreinte carbone d'un bâtiment. Avec le durcissement des seuils IC Construction en 2025, 2028 et 2031, leur utilisation devient incontournable pour respecter la re2020.

Claire Montrevault

Claire Montrevault

Experte en réglementation environnementale

Introduction : pourquoi les biosourcés sont au cœur de la re2020

La réglementation environnementale 2020 a profondément transformé les pratiques de construction en France. Au-delà de la performance énergétique, elle impose désormais de réduire l'impact carbone des bâtiments sur l'ensemble de leur cycle de vie. C'est là que les matériaux biosourcés entrent en jeu : issus de la biomasse végétale ou animale, ils stockent le carbone atmosphérique pendant leur croissance et le conservent tout au long de la vie du bâtiment.

Face au durcissement progressif des seuils réglementaires, comprendre et intégrer ces matériaux dans vos projets devient essentiel. Cet article vous guide à travers les différents matériaux disponibles, leurs performances et les stratégies pour optimiser votre bilan carbone.

Qu'est-ce qu'un matériau biosourcé ?

Selon la définition officielle du ministère de la Transition écologique, les matériaux biosourcés sont issus de la matière organique renouvelable (biomasse), d'origine végétale ou animale. Ils peuvent être utilisés comme matière première dans des produits de construction et de décoration, ou directement comme matériau de construction.

La nature de ces matériaux est très variée : bois, chanvre, paille, ouate de cellulose, textiles recyclés, balles de céréales, miscanthus, liège, lin, chaume ou encore herbe de prairie. Leurs applications dans le bâtiment sont multiples : structure, isolants, mortiers et bétons, matériaux composites ou chimie du bâtiment (peintures, colles).

Différents types de matériaux biosourcés pour la construction

Du bois au chanvre en passant par la paille : les matériaux biosourcés offrent une grande diversité de solutions

Ces matériaux répondent aux exigences du code de la construction et de l'habitation grâce à des évaluations techniques rigoureuses. Une grande partie d'entre eux font l'objet de règles professionnelles, d'avis techniques (Atec) ou d'appréciations techniques d'expérimentation (Atex), les classant parmi les matériaux reconnus par l'Agence qualité construction (AQC).

Les exigences de la re2020 et l'avantage carbone des biosourcés

La re2020, entrée en vigueur le 1er janvier 2022, introduit pour la première fois une dimension environnementale dans la réglementation de la construction. L'un des indicateurs clés est l'IC Construction (Indice Carbone Construction), qui mesure l'impact carbone des matériaux et du chantier.

Évolution des seuils IC Construction

Les seuils réglementaires se durcissent progressivement pour accompagner la décarbonation du secteur :

Pour les maisons individuelles : le seuil passe de 640 kg CO₂/m² en 2022 à 530 kg CO₂/m² en 2025, puis 475 kg CO₂/m² en 2028 et 415 kg CO₂/m² en 2031.

Pour les logements collectifs : le seuil évolue de 740 kg CO₂/m² en 2022 à 650 kg CO₂/m² en 2025, 580 kg CO₂/m² en 2028 et 490 kg CO₂/m² en 2031.

Le stockage carbone : l'atout majeur des biosourcés

Les matériaux biosourcés présentent un avantage unique : ils stockent le carbone capté lors de la croissance des végétaux. La re2020 valorise ce stockage grâce à l'analyse du cycle de vie dynamique. Pour les projets anticipant les seuils 2028 et 2031, le recours à au moins 100 kg de matériaux biosourcés par m² de surface de plancher devient quasi indispensable.

L'indicateur StockC (carbone biogénique stocké) permet de quantifier cette capacité. Bien qu'il soit actuellement calculé à titre informatif, il témoigne de l'engagement des pouvoirs publics à valoriser ces solutions.

Les principaux matériaux biosourcés pour la construction

Le bois : le plus utilisé

La France est la première puissance européenne en volume de bois sur pied, mais reste parmi les dernières en consommation par habitant. Le bois offre des applications multiples : structure (ossature bois, charpente), bardage extérieur, menuiseries et isolation (fibre de bois). Utilisé en structure, il permet de réduire significativement le gros œuvre, poste qui représente environ un tiers de l'impact carbone des bâtiments.

Maison en construction avec ossature bois

L'ossature bois combine performance structurelle et faible empreinte carbone

Le chanvre : polyvalent et performant

Le chanvre se décline sous plusieurs formes : laine de chanvre (panneaux ou rouleaux), chènevotte (en vrac), béton de chanvre et briques. La France est le premier producteur européen de chanvre, ce qui favorise les circuits courts. Ce matériau pousse rapidement sans engrais ni pesticides, offrant un bilan environnemental particulièrement favorable.

Ses caractéristiques techniques sont excellentes : conductivité thermique entre 0,039 et 0,042 W/m.K pour la laine, bonne régulation hygrométrique et résistance naturelle aux rongeurs. Pour atteindre une résistance thermique R=4 en mur, comptez environ 16 à 17 cm d'épaisseur.

La paille : économique et locale

La paille de céréales, coproduit agricole, constitue un isolant performant et particulièrement économique. Conditionnée en bottes, elle s'utilise en remplissage de caissons bois ou comme support d'enduits terre ou chaux. La plus ancienne maison en paille de France, la Maison Feuillette à Montargis, date de 1921 et témoigne de sa durabilité.

Des règles professionnelles existent depuis 2012 grâce au travail du Réseau français de la construction paille (RFCP), sécurisant la mise en œuvre et l'assurance des ouvrages.

La ouate de cellulose : recyclage vertueux

Fabriquée à partir de papier recyclé (journaux, magazines), la ouate de cellulose illustre parfaitement l'économie circulaire appliquée au bâtiment. Elle se met en œuvre principalement par soufflage dans les combles perdus ou insufflation dans les parois. Son déphasage thermique élevé contribue au confort d'été, critère désormais réglementé par la re2020.

Les autres matériaux émergents

D'autres ressources se développent : lin, liège expansé, laine de mouton, textile recyclé, balle de riz ou paille de lavande. Certaines sont encore peu valorisées : sur les 9 millions de tonnes de fibres végétales techniques disponibles en France, seulement 0,2 à 0,3 million de tonnes sont actuellement utilisées dans la construction.

Performances thermiques et confort d'été

Un atout pour le déphasage thermique

Le déphasage thermique représente le temps nécessaire à la chaleur pour traverser un isolant. Les matériaux biosourcés excellent dans ce domaine grâce à leur densité et leur capacité thermique. Là où la laine de verre offre un déphasage de 4 à 6 heures, la fibre de bois atteint 10 à 12 heures pour une épaisseur comparable.

Cette propriété s'avère décisive face aux épisodes caniculaires. La re2020 limite le nombre de degrés-heures d'inconfort estival (DH), et les biosourcés permettent de respecter ces seuils plus facilement, notamment en maison individuelle.

Schéma du déphasage thermique des matériaux biosourcés

Le déphasage thermique : un atout majeur des biosourcés pour le confort d'été

Régulation hygrométrique naturelle

Les matériaux biosourcés possèdent des capacités hygroscopiques remarquables : ils captent l'humidité ambiante et la restituent selon les conditions. Cette respiration naturelle améliore la qualité de l'air intérieur et évite les problèmes de condensation, à condition d'une mise en œuvre adaptée avec des membranes perspirantes.

Performances acoustiques

Grâce à leur structure fibreuse, les isolants biosourcés offrent également d'excellentes propriétés d'absorption acoustique. Le chanvre et la fibre de bois sont particulièrement appréciés pour les cloisons séparatives et les planchers intermédiaires.

Exemples concrets d'application

Maison individuelle en ossature bois et isolation biosourcée

Pour une maison de 120 m² respectant les seuils 2025, une solution type combine : ossature bois en structure, isolation en fibre de bois (18 cm en murs, 30 cm en toiture), menuiseries bois-aluminium et système de chauffage par pompe à chaleur. L'indicateur IC Construction peut ainsi descendre sous 450 kg CO₂/m², anticipant le seuil 2028.

Rénovation avec isolation biosourcée

En rénovation, le remplacement d'une isolation conventionnelle par de la ouate de cellulose en combles (R=8) et des panneaux de fibre de bois en murs par l'intérieur améliore significativement le bilan carbone. Le surcoût de 10 à 15 % par rapport aux isolants classiques est compensé par les performances de confort d'été et la qualité de l'air intérieur.

Béton de chanvre en neuf

Le béton de chanvre, mélange de chènevotte et de chaux, s'utilise en remplissage de structures bois. Projeté ou coulé, il assure isolation thermique, régulation hygrométrique et stockage carbone. Des projets comme le programme Pecquenchanvre dans le Nord-Pas-de-Calais démontrent sa viabilité en logement social.

Application de béton de chanvre en projection

Le béton de chanvre projeté : isolation et stockage carbone en une seule solution

Conclusion et points clés à retenir

Les matériaux biosourcés ne sont plus une option marginale mais deviennent incontournables pour répondre aux exigences croissantes de la re2020. Leur capacité à stocker le carbone, combinée à leurs performances thermiques et leur contribution au confort d'été, en fait des alliés précieux pour les projets de construction durable.

Le gros œuvre, le second œuvre et les lots techniques pèsent chacun environ un tiers de l'impact carbone des bâtiments. Agir sur ces trois postes avec des solutions biosourcées permet d'atteindre dès aujourd'hui les seuils 2028 et 2031. Les filières se structurent, les formations se développent et les garanties décennales sont désormais accessibles pour la plupart des techniques reconnues.

Pour votre projet, l'accompagnement par un bureau d'études thermiques compétent reste essentiel. L'étude thermique re2020 intègre désormais le calcul de l'analyse du cycle de vie et permet d'optimiser les choix de matériaux dès la conception.

Points clés à retenir
  • Les matériaux biosourcés stockent le carbone et réduisent jusqu'à 60 % l'empreinte carbone du bâtiment
  • Les seuils IC Construction se durcissent en 2025, 2028 et 2031, rendant ces matériaux quasi indispensables
  • Le bois, le chanvre, la paille et la ouate de cellulose sont les plus utilisés
  • Le déphasage thermique élevé améliore le confort d'été, critère réglementé par la re2020
  • Des règles professionnelles existent pour sécuriser la mise en œuvre et l'assurance

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