Accueil > Articles > inertie-thermique-re2020.php

Inertie thermique en re2020 : un atout clé pour le confort

Publié le 19/12/2025 | Temps de lecture : 8 min
Inertie thermique en re2020 : un atout clé pour le confort

L'inertie thermique : un bouclier naturel contre les variations de température

En résumé

L'inertie thermique désigne la capacité d'un bâtiment à stocker la chaleur puis à la restituer progressivement. En re2020, ce paramètre influence directement l'indicateur DH (degrés-heures d'inconfort) et peut réduire jusqu'à 33 % les périodes de surchauffe estivale. Opter pour une inertie lourde, combinée à une ventilation nocturne, constitue l'une des stratégies passives les plus efficaces pour garantir le confort d'été sans climatisation.

Antoine Maréchal Antoine Maréchal · Ingénieur thermicien · Publié le 19/12/2025

Sommaire

Qu'est-ce que l'inertie thermique ?

L'inertie thermique représente la capacité d'un matériau ou d'un bâtiment à absorber, stocker et restituer la chaleur de manière progressive. Concrètement, un bâtiment à forte inertie se réchauffe et se refroidit lentement, ce qui permet d'amortir les variations de température extérieure et de maintenir un climat intérieur stable.

Ce phénomène physique repose sur deux caractéristiques principales des matériaux : leur masse volumique (plus un matériau est dense, plus il peut stocker de chaleur) et leur capacité thermique (l'énergie nécessaire pour élever sa température d'un degré). Ainsi, le béton, la pierre ou la terre crue présentent naturellement une inertie élevée, tandis que les structures légères en bois ou en acier offrent une inertie plus faible.

En re2020, la méthode de calcul distingue deux types d'inertie complémentaires. L'inertie d'absorption correspond à la capacité du bâtiment à amortir les variations de température intérieure dues aux apports solaires et aux activités des occupants. L'inertie de transmission caractérise le déphasage et l'amortissement des flux thermiques traversant les parois extérieures. Compte tenu des niveaux d'isolation élevés exigés par la réglementation re2020, c'est principalement l'inertie d'absorption qui joue un rôle déterminant dans le confort d'été.

Schéma du principe de l'inertie thermique dans un bâtiment

Principe de fonctionnement de l'inertie thermique : stockage le jour, restitution la nuit

Les classes d'inertie en re2020

Le fascicule « Inertie » des règles Th-Bat définit cinq classes d'inertie pour caractériser les bâtiments, allant de « très légère » à « très lourde ». Cette classification s'applique aux trois échelles temporelles prises en compte dans le calcul réglementaire : l'inertie quotidienne, séquentielle et annuelle.

Les cinq classes d'inertie

Très légère : structures métalliques ou ossature bois avec doublages légers, sans masse thermique significative. C'est la classe la moins favorable au confort d'été.

Légère : construction à ossature bois avec plancher bois solivé, présence limitée de matériaux lourds.

Moyenne : maçonnerie traditionnelle avec isolation par l'intérieur (ITI), dalle béton sur vide sanitaire ou plancher intermédiaire léger.

Lourde : construction maçonnée avec isolation par l'extérieur (ITE), dalle béton sur terre-plein, présence importante de parois lourdes accessibles.

Très lourde : structure béton massive avec ITE, planchers et refends en béton plein, maximum de surfaces lourdes exposées à l'ambiance intérieure.

Trois méthodes permettent de déterminer la classe d'inertie d'un bâtiment selon les règles Th-Bat. La méthode forfaitaire, la plus simple, s'appuie sur la nature des parois (plancher bas, plancher haut, parois verticales) pour attribuer directement une classe. La méthode par points affine ce calcul en comptabilisant le nombre de parois lourdes. Enfin, la méthode par calcul détaillé utilise les caractéristiques thermiques précises des matériaux (conductivité, masse volumique, capacité thermique) pour déterminer les coefficients Cm_surf et Am_surf.

Impact sur les indicateurs re2020

L'inertie thermique influence plusieurs indicateurs de la re2020, avec un effet particulièrement marqué sur le confort d'été (DH). Voici comment ce paramètre intervient dans chaque calcul :

Indicateur DH (degrés-heures d'inconfort) : c'est sur cet indicateur que l'inertie a l'impact le plus significatif. Un bâtiment à inertie très lourde peut réduire son DH de 20 à 33 % par rapport à une construction légère, selon la zone climatique et la configuration du projet. Dans les zones chaudes (H2d et H3), cette différence devient déterminante pour respecter le seuil réglementaire de 1250 DH.

Indicateur Bbio (besoins bioclimatiques) : l'inertie agit sur les besoins de chauffage comme de refroidissement. Une inertie lourde permet d'amortir les pics de température et de réduire les besoins en froid, mais elle peut également légèrement augmenter les besoins en chauffage du fait de la relance plus longue. Selon les retours d'expérience des bureaux d'études, viser une inertie moyenne à lourde représente souvent le meilleur compromis pour optimiser le Bbio.

Indicateurs Cep et Cep,nr : l'impact de l'inertie sur les consommations d'énergie primaire découle principalement de son effet sur les besoins. En limitant le recours à la climatisation ou au chauffage d'appoint, une bonne inertie contribue à réduire les consommations globales.

Graphique montrant l'impact de l'inertie sur l'indicateur DH

Impact de la classe d'inertie sur les degrés-heures d'inconfort selon la zone climatique

Matériaux et solutions pour optimiser l'inertie

Le choix des matériaux et des techniques constructives détermine directement la classe d'inertie du bâtiment. Voici les principales solutions pour maximiser ce paramètre :

Matériaux à forte inertie

Le béton reste le matériau de référence pour apporter de l'inertie, grâce à sa masse volumique élevée (environ 2300 kg/m³) et sa bonne conductivité thermique. Les dalles, refends et murs en béton plein constituent des réserves thermiques efficaces lorsqu'ils sont exposés à l'ambiance intérieure.

La brique pleine et les blocs de béton offrent également une inertie significative, bien que légèrement inférieure au béton banché. Les enduits épais à base de chaux ou de terre peuvent compléter utilement l'inertie des parois.

Les matériaux naturels comme la terre crue (pisé, adobe, BTC) ou la pierre présentent d'excellentes performances d'inertie, tout en répondant aux exigences carbone de la re2020. Le Cerema souligne l'intérêt de ces solutions dans les zones à fort ensoleillement.

L'isolation par l'extérieur (ITE) constitue un levier majeur pour préserver l'inertie des murs. En plaçant l'isolant côté extérieur, la masse du mur reste accessible à l'ambiance intérieure et peut jouer pleinement son rôle de régulateur thermique. À l'inverse, l'isolation par l'intérieur (ITI) « coupe » la masse thermique du mur et réduit l'inertie effective du bâtiment. Selon les études de la FFB, le passage d'une ITI à une ITE permet généralement de gagner une classe d'inertie.

Pour les constructions à ossature bois, naturellement plus légères, plusieurs stratégies permettent d'améliorer l'inertie. L'intégration de dalles béton sur terre-plein, l'ajout de refends maçonnés, l'utilisation de parements intérieurs lourds (fermacell, terre crue) ou encore l'incorporation de matériaux biosourcés denses (fibre de bois haute densité) apportent la masse thermique nécessaire.

Inertie et ventilation nocturne : le duo gagnant

L'inertie thermique déploie tout son potentiel lorsqu'elle est associée à une stratégie de ventilation nocturne. Le principe est simple : pendant la journée, les parois lourdes absorbent la chaleur et limitent l'élévation de température intérieure. La nuit, lorsque la température extérieure chute, une ventilation renforcée (surventilation ou ouverture des fenêtres) permet d'évacuer la chaleur stockée et de « recharger » la capacité de stockage pour le lendemain.

Cette synergie entre inertie et ventilation nocturne est particulièrement reconnue par le calcul re2020, qui valorise les logements traversants offrant de bonnes possibilités de ventilation naturelle. La méthode de calcul prend en compte les scénarios d'ouverture des fenêtres et leur impact sur le rafraîchissement nocturne. Un logement traversant (où chaque orientation de façade représente moins de 75 % de la surface vitrée totale) bénéficie d'un meilleur potentiel de ventilation transversale.

D'autres équipements de rafraîchissement passif complètent efficacement l'inertie. Les brasseurs d'air, en accélérant le mouvement de l'air, abaissent la température ressentie de 2 à 3°C sans consommer beaucoup d'énergie. Les puits climatiques exploitent la fraîcheur du sol pour préconditionner l'air entrant. Ces solutions sont valorisées dans le calcul du DH et permettent souvent de respecter les seuils réglementaires sans recourir à la climatisation, conformément aux objectifs de la stratégie confort d'été de la re2020.

Schéma de la ventilation nocturne combinée à l'inertie thermique

La ventilation nocturne évacue la chaleur stockée et régénère la capacité d'absorption

Exemples concrets et chiffres clés

Cas d'une maison individuelle en zone H2b :

Une maison de 120 m² en maçonnerie traditionnelle avec ITI présente un DH de 650 degrés-heures. En passant à une isolation par l'extérieur (ITE), l'inertie passe de « moyenne » à « lourde », et le DH chute à 520 degrés-heures, soit une réduction de 20 %. Cette amélioration permet de rester confortablement sous le seuil bas de 350 DH avec quelques ajustements complémentaires (protections solaires, brasseur d'air).

Cas d'un logement collectif en zone H3 (climat méditerranéen) :

Dans cette zone chaude, le respect du seuil DH représente un défi majeur. Une étude comparative menée par le CSTB montre qu'un bâtiment collectif en structure béton avec ITE (inertie très lourde) affiche un DH inférieur de 33 % à celui d'un bâtiment équivalent en structure bois (inertie légère). Pour atteindre la conformité en zone H3 avec une structure légère, il faut généralement cumuler plusieurs leviers passifs : occultations performantes, logements traversants, brasseurs d'air, ratio d'ouverture des baies optimisé.

Le rapport Rivaton remis au ministère du Logement en juillet 2025 plaide justement pour une meilleure prise en compte de l'inertie thermique dans les zones chaudes. L'utilisation de matériaux à forte capacité de stockage comme la terre crue, le béton ou certaines pierres locales pourrait apporter des bénéfices notables en confort sans recourir à la climatisation. Cette évolution méthodologique fait partie des pistes d'amélioration envisagées pour les prochaines étapes de la re2020.

Chiffres clés à retenir

Jusqu'à 33 % de réduction du DH en passant d'une inertie légère à très lourde

Gain d'une classe d'inertie en passant d'une ITI à une ITE sur mur maçonné

2 à 3°C de température ressentie en moins grâce aux brasseurs d'air

Seuil bas DH : 350 (confort optimal) / Seuil haut : 1250 (limite de conformité)

Conclusion et points clés à retenir

L'inertie thermique constitue un levier fondamental pour garantir le confort d'été en re2020. En permettant au bâtiment de stocker la chaleur pendant les pics de température et de la restituer progressivement, elle limite naturellement les surchauffes sans recourir à des systèmes énergivores. Les cinq classes d'inertie définies par les règles Th-Bat permettent de caractériser précisément ce paramètre et son impact sur les calculs réglementaires.

Pour optimiser l'inertie de votre projet, privilégiez les matériaux lourds (béton, brique, pierre, terre crue) et l'isolation par l'extérieur qui préserve la masse thermique accessible. Associez cette stratégie à une ventilation nocturne efficace et à des protections solaires performantes pour maximiser les bénéfices sur l'indicateur DH. Dans les zones climatiques chaudes (H2d et H3), l'inertie devient souvent déterminante pour atteindre la conformité réglementaire.

Besoin d'une étude thermique re2020 pour évaluer précisément l'inertie de votre projet et optimiser votre confort d'été ? Notre équipe d'experts peut réaliser les simulations nécessaires et vous conseiller sur les meilleures solutions techniques adaptées à votre contexte.

Continuer votre lecture

Cet article vous a été utile ?

Découvrez tous nos articles et guides pratiques.


Voir tous les articles

Conseils d'experts - Actualités réglementaires - Guides pratiques